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Sacramentaire de la cathédrale de Limoges

Il n'est pas un historien de la miniature romane qui n'ait été frappé par la beauté du sacramentaire de la cathédrale Saint-Etienne de Limoges. La véhémence baroque, la stylisation exacerbée, les couleurs violentes ou subtiles des enluminures de ce manuscrit en font un chef-d'oeuvre incontesté.

 

Le sacramentaire est un livre liturgique, à l'usage du célébrant, qui contenait tout ce qu'il fallait à celui-ci : oraisons, préfaces, canon, pour célébrer les Saints Mystères.

 

(Retrouvez le Sacramentaire sur Gallica)

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L'ensemble de l'oeuvre du peintre du sacramentaire comprend encore trois autres ouvrages

 

En effet deux énormes bibles (Bible de Saint-Yrieix) complète l'oeuvre. Le sacramentaire de Saint-Etienne, quoique d'assez petit format, est un manuscrit de très grand luxe.

 

Il est illustré de peintures en pleine page et de quelques lettres ornées. Ces peintures en pleine page représentent dans l'ordre : la Nativité, la Lapidation de saint Etienne, le baptême du Christ et les Noces de Cana, la Présentation au temple, l'Entrée du Christ à Jérusalem, la Cène et le Lavement des pieds, le Christ en majesté dans le tétramorphe, la Crucifixion, les Saintes Femmes au tombeau, l'Ascension et la Pentecôte. Dans son analyse détaillée J. Porcher rapproche ce manuscrit des oeuvres ottoniennes de la fin du Xème siècle. Cependant on trouve aussi des correspondances entre le sacramentaire et certaines oeuvres françaises.

 

Les couleurs du sacramentaire constituent deux groupes : on y trouve des couleurs très vives, le bleu soutenu, le rouge vif employé en filets pour souligner les rides des visages, des paumes des mains. A côté de ces couleurs franches, on note toute une série de teintes précieuses et des demi-teintes : le rose pâle retravaillé en filets blancs, le bleu lavande souligné de gris.

 

La découverte des fresques du même artiste dans la crypte romane de la cathédrale de Limoges

 

Elle a révélé des scènes de l'Annonciation. Le dessin est le même que celui des personnages du sacramentaire. Enfin ces fresques sont exactement contemporaines du manuscrit entre 1090-1095 bien avant 1105 qui marque le sac de la cité de Limoges et l'incendie de la cathédrale par les gens du château.

 

(Source - La décoration des manuscrits à Saint-Martial de Limoges /Gaborit-Chopin)

 

 

Sacramentaire cathédrale de Limoges

Le Baptême du Christ du Sacramentaire

de Limoges

 

Le Jourdain qui baigne le Christ, dans la scène du Baptême, est figuré comme sortant d'amphores tenues par deux personnages : on savait en effet par l'historien Josèphe et par s. Jérôme que les sources du Jourdain sont deux, nommées Jor et Dan, et c'est ainsi que les désigne dès 975 l'Apocalypse espagnole de Gerona. Mais pour les voir représentées sous les traits de divinités fluviales, comme ici, il faut aller, bien loin de Limoges, consulter, entre autres, le graduel qui provient de l'abbaye de Prüm, en Rhénanie (Bibliothèque nationale, lat. 9448, fol. 26 v., XIe siècle).

 

Le Christ nu est debout, de face, entouré par les eaux du Jourdain qui montent vers lui : elles s'échappent d'amphores tenues par deux figures personnifiant le fleuve. Saint Jean le baptise par infusion ; à droite au lieu de l'ange habituel, un homme semble s'adresser à lui.

 

Le Christ bénit des amphores que remplit un personnage agenouillé. A droite de la scène un bâtiment. Les Noces de Cana qui font pendant au Baptême dans le graduel comme dans le sacramentaire remontent elles-mêmes aux formules en honneur dans l'entourage des empereurs ottoniens.

 

 

 

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La place du Sacramentaire dans la liturgie

Dans le haut Moyen Age, l'officiant disposait pour dire la messe d'un livre spécial qui comprenait les oraisons, les préfaces et le canon : c'est le sacramentaire, que remplacera peu à peu et supplantera complètement au XIIIe siècle le missel, par fusion avec l'évangé- liaire, l'épistolier, le graduel, livres du diacre, du sous-diacre et des chantres.

Le sacramentaire de la cathédrale St. Étienne de Limoges, aujourd'hui manuscrit latin 9438 de la Bibliothèque nationale, date des environs de l'an 1100; la richesse et l'originalité des images qui le décorent, le talent impétueux du peintre font de ce volume l'un des plus précieux monuments de notre art roman. A Limoges même, dont l'école picturale nous a laissé d'admirables témoins dans les manuscrits de l'abbaye de St. Martial, il est à part : on retrouve en lui la trace évidente d'une longue tradition locale, mais elle s'y mêle d'apports si neufs qu'il faut bien supposer que l'artiste, un Limousin dont le tempérament méridional éclate à chaque page, a reçu d'ailleurs, pour les traiter à sa manière, des thèmes d'inspiration que rien ne lui offrait sur place.

Que le manuscrit soit né dans l'entourage de l'abbaye de Saint-Martial, le caractère de ses lettres ornées l'indiquerait à défaut de la liturgie ; tout y rappelle la peinture limousine des Xe et XIe siècles sous ses divers aspects : entrelacs aquitain plaqué en nœuds serrés sur les hastes, bêtes furieusement enlacées à la façon des reliefs de Souillac, dessin ferme sous lequel apparaît le tracé géométrique, tonalités chaudes que relèvent des touches de jaune vif, bleus profonds. Mais les scènes figurées présentent des détails manifestement importés. Abbaye considérable, centre d'études fameux, saint Martial attirait des foules de pèlerins venus de toutes les régions de l'Occident ; par eux, par leurs offrandes, par les moines voyageurs qui assuraient la liaison avec les plus lointaines communautés, Limoges participait à la vie littéraire et artistique du monde entier d'alors. Ainsi s'explique que le sacramentaire peint pour la cathédrale présente des particularités que l'on chercherait vainement dans son voisinage immédiat. 

 

(Source - Le Sacramentaire de Limoges / Jean Porcher)

 

 

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Le Christ en majesté du Sacramentaire

de Limoges

 

Le Christ de majesté est entouré des quatre évangélistes, dont les têtes sont remplacées, pour trois d'entre eux, par celles des animaux qui les symbolisent : aigle, lion, bœuf. Ces figures monstrueuses n'étaient pas inconnues chez nous, du moins à une époque très ancienne : on les trouve dans un évangéliaire de l'abbaye de Ste. Croix de Poitiers (Bibliothèque de Poitiers, ms. 65, VIIIe siècle), dans le sacramentaire écrit entre 755 et 787 pour l'abbé de Flavigny (sacramentaire dit de Gellone, lat. 12048) , dans un groupe d'évangéliaires bretons, à Tours et Fleury aux IXe et Xe siècles; un peu plus tard, entre les Xe et XIIIe siècles, en Espagne dans certains exemplaires de l' Apocalypse de Beatus, en Italie. Mais c'est vers les régions rhénanes et bavaroises, dans les manuscrits ottoniens voisins du nôtre par la date que nous rencontrons les images qui lui sont le plus étroitement apparentées : évangéliaire d'Henri III, écrit entre 1043 et 1046 à Echternach (Bibliothèque de l'Escurial) évangéliaire de l'abbé Gérard de Luxeuil (Bibliothèque nationale, nouv. acq. lat. 2196, milieu du XIe siècle). Ici encore la comparaison des thèmes nous dirige vers les terres d'Empire. Ces évangélistes ne se trouvent plus alors dans nos régions qu'à l'état isolé : sur un chapiteau de Moissac (XIIe siècle), dans un évangéliaire de l'abbaye de St. Evroult (Bibliothèque de Rouen, ms 31, XIe siècle).

Image centrale du Sacramentaire, qui fait face à la Crucifixion, entre le Sanctus et le Te igitur, ces derniers mots peints comme plus haut le Vere dignum. Le Christ est assis dans une mandorle ; il tient un livre de la main gauche et bénit de la mmain droite. Dans les angles, les quatre évangélistes, dont les têtes ont été remplacées par celles de leurs symboles : l'homme (saint Mathieu), l'aigle (saint Jean), le lion (saint Marc) et le boeuf (saint Luc).

 

Mais c'est la figure de la Pentecôte, où le peintre du sacramentaire a mis tant de sévère grandeur, qui nous donne peut-être la preuve certaine d'une empreinte ottonienne, d'autant plus nette qu'elle est presque mécanique (pl. XII). Des rubans ondulés semblent sortir des oreilles divines et se terminent par une sorte d'embouchure d'où quatre groupes de trois rubans plus étroits s'échappent pour aller se poser sur la tête de chacun des apôtres. Image unique dans l'iconographie française; au tympan célèbre de Vézelay les rayons qui partent des doigts du Christ n'ont pas cette forme singulière : on ne saurait comparer les deux représentations, encore moins les expliquer l'une par l'autre. Pour comprendre celle du sacramentaire de St. Étienne, il faut se reporter de nouveau à l'art de l'Est et s'apercevoir ainsi que l'embouchure de nos rubans, ces sortes de tuyaux acoustiques, dérive des torches renversées plus ou moins stylisées qui marquent de façon constante, à Reichenau, à Ratisbonne, l'idée d'inspiration céleste ou prophétique : stylisées, elles ont l'aspect de flèches à trois pointes; au naturel, elles projettent trois flammes hors d'une embouchure exactement semblable à celle du ruban de notre Pentecôte (évangéliaire de l'école de Ratisbonne, Munich, Clm I 5 713, début du XIIe siècle ).

 

(Source - Le Sacramentaire de Limoges / Jean Porcher)

La Pentecôte du Sacramentaire de Limoges

 

C'est la figure de la Pentecôte, où le peintre du sacramentaire a mis tant de sévère grandeur, qui nous donne peut-être la preuve certaine d'une empreinte ottonienne, d'autant plus nette qu'elle est presque mécanique. Des rubans ondulés semblent sortir des oreilles divines et se terminent par une sorte d'embouchure d'où quatre groupes de trois rubans plus étroits s'échappent pour aller se poser sur la tête de chacun des apôtres. Image unique dans l'iconographie française; au tympan célèbre de Vézelay les rayons qui partent des doigts du Christ n'ont pas cette forme singulière : on ne saurait comparer les deux représentations, encore moins les expliquer l'une par l'autre. Pour comprendre celle du sacramentaire de St. Étienne, il faut se reporter de nouveau à l'art de l'Est et s'apercevoir ainsi que l'embouchure de nos rubans, ces sortes de tuyaux acoustiques, dérive des torches renversées plus ou moins stylisées qui marquent de façon constante, à Reichenau, à Ratisbonne, l'idée d'inspiration céleste ou prophétique : stylisées, elles ont l'aspect de flèches à trois pointes; au naturel, elles projettent trois flammes hors d'une embouchure exactement semblable à celle du ruban de notre Pentecôte (évangéliaire de l'école de Ratisbonne, Munich, Clm I 5 713, début du XIIe siècle ).

Assis dans un médaillon à fond d'or, le Christ envoie le Saint-Esprit à ses apôtres ; de ses oreilles partent des rubans qui se ramifient en quatre groupe de trois et vont se poser sur la tête des personnages placés au-dessous. Tous ont le regard rendu lointain et semblent concentrer dans un effort surhumain. Chacun des apôtres tient un rouleau dans les plis de son manteau. Quatre étoiles figurent le Paradis.

 

(Source - Le Sacramentaire de Limoges / Jean Porcher)

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Sacramentaire cathédrale de Limoges

Ponctuellement, des rapprochements peuvent être opérés avec les productions de l'émaillerie contemporaine : on constate la similitude de certains drapés aux retombées amollies, ou encore la parenté troublante que présentent les figures de l'ange puissant sortant de sa nuée à Saint-Junien avec l'un des anges du toit de la châsse d'Ambazac. Toutefois, c'est l'emploi de graphies ou de certains motifs peu fréquents dans la peinture murale, qui fournit les références les plus tangibles.

 

Les séries de lobes en forme de larme emboîtés les uns dans les autres, les hachures quadrillées ou les rehauts en croissant présents sur les vêtements de certains personnages (Dieu dans la scène de la Création, les bourreaux de la lapidation de saint Etienne aux Salles-Lavauguyon) constituent un répertoire fortement caractérisé, qui est proche de celui utilisé dans le scriptorium de Saint-Martial de Limoges par les peintres de la Seconde Bible, et dans les manuscrits qui lui sont affiliés à l'époque de son premier abbé clunisien, Adéma (1063-1114).

 

Ces procédés graphiques se retrouvent également dans les oeuvres du peintre du Sacramentaire de Saint-Etienne de Limoges et de ses successeurs. Les torses allongés, les proportions élégantes, le tracé des profils, les éléments de décor, comme l'emploi d'une palmette spécifique, suggèrent également une filiation. Il est intéressant de constater que cette palmette très souple, aux contours festonnés dont chaque lobe est strié de trois traits parallèles, répond à une définition strictement identique dans les miniatures du Peintre du Sacramentaire, qui l'utilise de façon semble-t-il exclusive (le fol. 228 r de la Bible de Saint-Yrieix en présente un très bel exemple), et à Saint-Junien où elles occupent les espaces laissés libres par les mandorles.

 

 

(Source - Eric SPARHUBERT / Les peintures romanes de la nef de la collégiale de Saint-Junien)

 

Une analyse minutieuse confirmerait ces rapports qu'on ne peut ici qu'indiquer. Notons encore ce détail : les « claves » qui décorent les vêtements, rectangles dorés répandus à profusion, viennent à n'en pas douter, car ils n'ont pas d'analogue en France, de modèles comme l'évangéliaire de la cathédrale de Bamberg, du début du XIe siècle (Munich, Clm 4454). Adhémar de Chabannes, le chroniqueur de St. Martial, nous apprend que le duc d'Aquitaine Guillaume III de Poitiers et l'empereur Henri II étaient à ce point liés d'amitié qu'ils se gratifiaient mutuellement de cadeaux. Les tableaux du sacramentaire de St. Étienne illustrent à merveille ces échanges, et c'est le mérite du peintre que d'avoir su, d'éléments divers, tirer une œuvre si typiquement limousine qu'elle semble porter en elle tout l'art des émailleurs.

Le volume, qui mesure 270 sur 165 mm., est orné de 14 peintures à pleine page dont 12 sont reproduites ici (les deux autres, de composition analogue à celle de notre pl. VII, forment le TE IGITVR du Canon, aux fol. 59 v. et 6o); il comprend en outre neuf lettres ornées plus ou moins importantes. Il manque sans doute une peinture, peut-être la Visitation, par suite d'une lacune d'un feuillet entre les fol. actuels 31 et 32.

 

(Source - Le Sacramentaire de Limoges / Jean Porcher)

 

 

Crucifixion du Sacramentaire de Limoges

 

Des anges entourent le Christ dans sa montée au ciel, de part et d'autre de l'auréole qui s'élève avec lui (pl. XI) : c'est la formule syrienne de l'Ascension, qui prévaudra désormais en Occident. Mais alors que, selon cette formule, deux autres anges, restés parmi eux, annoncent aux apôtres que le Sauveur reviendra un jour, ce sont ici les compagnons du Christ qui, penchés vers le sol, leur parlent du haut du ciel. Ce type simplifié, où les deux aspects de la scène, céleste et terrestre, se complètent sans plus se confondre, a connu une grande diffusion; on l'a reproduit à Cahors, à Mauriac, à Collonges, à Chartres. Il semble que l'image de notre sacramentaire soit la plus ancienne de ce type en France; or la même nous est donnée un siècle auparavant, par un évangéliaire du XIe siècle, à St. Pierre de Salzbourg.

Parmi les enluminures du Sacramentaire de la cathédrale de Saint-Etienne de Limoges, la Crucifixion est abordé avec un Christ représenté vivant , les yeux ouverts, mais déjà selon la formule qui prévaut au Xième siècle en Occident, sa tête se penche, son corps s'affaisse, son attitude marque la souffrance et l'approche de la mort.Bientôt ses yeux se fermeront : c'est ainsi qu'on le représentera toujours désormais. Au dessus, les médaillons du soleil et de la lune se voilent en partie face, des nuages stylisés les entourent. Au pied de La Croix un dragon symbolise les péchés du monde que Jésus est venu racheter, des morts sortent de leur tombeau. A gauche Marie, à droite Jean.

 

(Source - Le Sacramentaire de Limoges / Jean Porcher)

 

 

Sacramentaire de Saint-Martial de Limoge
Sacramentaire de Saint-Martial de Limoge

Résurrection du Sacramentaire de Limoges

 

Les trois saintes femmes s'approchent du tombeau ; elles esquissent un geste d'effroi devant l'ange qui le garde, assis sur la dalle soulevée ; le linceul est enroulé au fond du caveau. Du hau du ciel, un ange descend en plongeant, un encensoir à la main.

 

(Source - Le Sacramentaire de Limoges / Jean Porcher)

 

 

Enluminures sacramentaire
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